Manutention manuelle: Ce que tout gestionnaire doit savoir avant de choisir une formation

Votre entreprise, comme plusieurs autres, compte encore des tâches de manutention manuelle. Vos manutentionnaires ont différents niveaux d’expérience et certains, malheureusement, se blessent au dos en réalisant leur travail au quotidien. Vous avez formé vos travailleurs sur les bonnes méthodes de travail, mais cela ne donne pas vraiment de résultats? Vous en êtes venus à penser que la formation à la manutention manuelle est un mal nécessaire pour vous conformer à la Loi sur la santé et la sécurité du travail, mais que l’impact réel sur la diminution des maux de dos dans votre entreprise est quasi nul…  Est-ce que vous connaissez la stratégie intégrée de prévention en manutention (SIPM)? Cette approche, développée par l’Institut de Recherche Robert-Sauvé en Santé et Sécurité du Travail (IRSST) a révolutionné la façon d’aborder non seulement la formation à la manutention manuelle, mais aussi la prévention des blessures liées à la manutention. Si votre entreprise compte sur la manutention manuelle pour réaliser son cœur de métier (core business), vous devez lire ce qui suit.

La formation à la manutention manuelle: les limites de l’approche traditionnelle

Depuis une vingtaine d’années, certains mettent de l’avant des programmes de formation à la manutention manuelle génériques axés sur des méthodes prescrites à appliquer en tout temps, formations dans lesquelles on insiste sur l’étape du soulèvement afin de prévenir les surcharges. Au cours de ces formations, souvent courtes, théoriques et données en salle, la technique dos droit – genoux fléchis a été largement enseignée comme si c’était la panacée.

Or, on réalise maintenant que ces formations que l’on peut maintenant qualifier de « classiques » ne fonctionnent pas. Les notions qui y sont enseignées sont difficiles à appliquer au quotidien sur le terrain. Pourquoi ce constat? La manutention est une activité plus complexe qu’elle n’y parait. Les contextes de manutention sont trop changeants pour qu’une seule et unique méthode puisse venir à bout de la multitude de situations auxquelles un manutentionnaire peut et doit faire face. La manutention est une activité très diversifiée qui nécessite de développer des savoir-faire permettant au manutentionnaire de composer avec cette pluralité. Aussi, il ne s’agit pas seulement de prévenir les risques de blessures. Un bon manutentionnaire ne perd jamais de vue les objectifs de production qui lui sont donnés et sait préserver sa santé. Finalement, on perçoit souvent la manutention comme une « job de bras » comme si seulement la dimension physique de la tâche avait son importance. Or, un bon manutentionnaire prend constamment des décisions affectant sa santé par rapport à des informations prises dans l’environnement de travail.

La manutention: bien plus qu’une job de bras

Comme les formations classiques ne sont pas adéquates, à quoi ressemble une bonne formation à la manutention? Pour faire face à la diversité des situations qu’un manutentionnaire rencontre, il faut bonifier les façons de faire qu’il maîtrise. Un des objectifs d’une formation à la manutention est donc d’enrichir le registre gestuel des manutentionnaires en s’inspirant du savoir-faire des manutentionnaires experts de l’entreprise. Plutôt que de miser sur un formateur-expert qui sait tout, la nouvelle approche fait une large place à la participation active des travailleurs au processus de formation. La formation s’articule donc autour de savoir-faire développés par les manutentionnaires experts de l’entreprise afin d’atteindre les objectifs de production qui leur sont imposés tout en prévenant les blessures. La formation est alors montée à partir de situations réelles de manutention préalablement identifiées et d’exemples propres au milieu pour lesquels les savoir-faire en question ont été utilisés. Ces savoir-faire experts ont évolué au fil des ans et sont maintenant guidés par cinq principes d’action (Denys Denis et al, IRSST, 2019):

  1. Réduction du chargement initial
  2. Répartition du chargement
  3. Stabilisation du tandem travailleur-charge
  4. Continuité du mouvement
  5. Mise à profit des ressources       

Afin de former des manutentionnaires, il y a deux compétences qu’une formation à la manutention doit enseigner. La première compétence vise le développement de l’habileté à analyser la situation de manutention. Le manutentionnaire est donc formé à identifier les indices importants sur lesquels baser son choix de méthode de manutention afin d’atteindre les objectifs de production, et cela, sans se blesser. La deuxième compétence vise le développement de la capacité du manutentionnaire à organiser son travail afin de réaliser son travail avec efficience en évitant, entre autres, les re-manutentions et les déplacements inutiles.

Pour ancrer davantage les apprentissages, les formations doivent inclure de la pratique. Le temps et le contexte de pratique peuvent varier. En effet, le temps de pratique peut être d’une heure et mettre l’emphase sur des principes clés en manutention. Dans d’autres cas, l’entreprise peut prévoir une période d’entraînement à la tâche. Ce choix dépend, entre autres, de l’importance de la manutention dans l’entreprise. Pour ce qui est du contexte d’apprentissage, il est possible de pratiquer hors de la production dans un environnement contrôlé ou d’être coaché pendant le travail réel.

Cet article met en lumière les conditions de succès d’une formation à la manutention manuelle selon les recherches les plus récentes en la matière. Il permet de voir comment les modalités de la formation ont un impact sur le succès des apprentissages et la prévention des maux de dos.

Pour implanter la stratégie intégrée de prévention en manutention (SIPM), il faut dépasser le simple fait de former les travailleurs. Il importe aussi d’éliminer les risques liés à la manutention manuelle à la source. S’il n’est pas possible d’éliminer la manutention manuelle, il est souvent possible d’éliminer les obstacles à la manutention afin de permettre l’application des bons savoir-faire. Par exemple, une boîte pourrait plus facilement être glissée d’une étagère à un chariot si ce n’était d’un rebord exigeant de soulever la boite. Il faut alors voir à éliminer ce rebord pour faciliter le glissement de la boîte et ainsi éviter de forcer ou de la soulever inutilement. 

Pour plus d’information sur cette nouvelle approche, n’hésitez pas à nous contacter.

Références

Programme de formation participative en manutention manuelle : Fondements théoriques et approche proposée, 2011, disponible sur le site de l’IRSST

Vers une stratégie intégrée de prévention en manutention, 2019, disponible sur le site de l’IRSST